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Carte de presse vs carte d'artisan

Il était une fois une journaliste qui rêvait d’être couturière

Rencontre avec Bénédicte, une princesse qui rêvait de se piquer les doigts mais qui, trop douée à l’école, n’avait pu suivre son cœur.

Carte de journaliste vs carte d'artisan

Bénédicte Gateclou

Le Bigorno piquant
lebigornopiquant.com

Le bigorno piquant est domicilié à Authie, dans le Calvados. Quelle est son histoire ? 

J’ai créé mon entreprise en octobre 2014.

A l’époque, j’étais journaliste. Mes créations écolos en tissu était une activité annexe. 

J’ai mené de front les deux activités jusqu’à ce que je fasse un burn-out dans mon journal : le 15 juin 2016, le côté droit de mon visage se paralyse au travail. Les médecins ont cru à un AVC. Prise en charge en urgence, il s’est avéré que c’était une paralysie faciale a frigore, dont on ignore la cause.

8 mois plus tard, 2 jours avant la reprise de mon travail, nouvelle hospitalisation dans un état critique. Mon corps est en train de mourir, organe après organe. Contre toute attente, je sors du coma. Une seule réaction : « La vie m’offre une deuxième chance, je n’ai pas le droit de la rater ».

Alors je décide de me consacrer à ma passion : la couture.

Car, même si j’avais adoré être journaliste, je ne me retrouvais plus dans ce métier. Plutôt que la raison, c’est mon corps qui m’a forcé à prendre un nouveau tournant professionnel.

Je situerais donc le vrai démarrage de mon entreprise le 28 avril 2018, quand j’ai quitté le journal pour « inaptitude à tout poste dans l’entreprise ». (Depuis, ma maladie a été reconnue d’origine professionnelle. A lire aussi : Mon grand départ…)

Avez-vous reçu des aides spécifiques pour accompagner vos reconversion & installation ?

Pour l’instant, je n’ai bénéficié d’aucune aide à l’installation. Le basculement d’activité secondaire à activité principale, s’est fait tout naturellement. Du coup, comme l’entreprise avait 4 ans, je ne pouvais plus prétendre à des aides à l’installation.

Quelles ont été les toutes premières difficultés de votre vie d’entrepreneur ? 

Pour moi, c’est de savoir anticiper.

Je travaille à flux tendu. J’ai démarché une boutique physique à Caen et vends sur la plateforme Etsy. Je fais également des expos-vente. Pour les produits que je vends le mieux, je réponds au coup par coup aux demandes. J’aimerais avoir un petit stock d’avance mais… C’est la rançon du succès !

Auriez-vous aimé bénéficier d’aides particulières ? 

J’aimerais bénéficier d’une formation à la conduite d’entreprise : apprendre à gérer justement les stocks, savoir anticiper, s’organiser. Je sais que ça existe mais j’attends d’avoir moins le nez dans le guidon pour m’inscrire à une formation comme cela.

Avez-vous également eu de belles surprises lors de votre lancement ?

La belle surprise fût de constater que mes créations plaisaient autant. Mes essuie-tout lavables, éponges lavables (tawashis) et lingettes lavables partent comme des petits pains.

De journaliste à couturière, il n'y a qu'une aiguille ! Essuie-tout lavable Le bigorno piquant

A quoi ressemble votre quotidien au sein du bigorno piquant ? 

Mon quotidien au sein de mon entreprise ressemble à celui de beaucoup de mamans solo d’ados en résidence alternée : je travaille à fond quand les enfants ne sont pas là et plus légèrement quand ils sont présents. 

J’essaie de coudre tous les jours. Je vais, par exemple, passer une journée à découper des pièces. Le lendemain, je me mets à la couture durant deux heures. Quand j’en ai marre, je me fais une pause internet. Passage en revue des mails, répondre à des clients qui me font des commandes spécifiques. Je m’accorde et m’oblige tous les deux jours à une livraison à vélo (à assistance électrique) à la boutique qui vend mes produits ou à la Poste pour envoyer mes commandes. 

Une journée type serait : 

  • Lever à 7h20 pour petit-déjeuner avec les enfants avant leur départ pour le lycée. Gestion de la maison : rangement, lavage des tissus, toilette. Petit tour sur Etsy, Facebook, Instagram, messageries. 
  • A 10h, découpe des pièces en tissu, couture jusqu’à 12h30. 
  • 12h30-14h : pause déjeuner.
  • 14h – 18h40 : Découpe, couture, livraison des colis, photos et mise en ligne de mes créations sur le site Etsy.
  • 18h40: fin de ma journée de travail.

Mas il n’est pas rare que devant un bon film à la télé le soir, après le dîner, je tisse des tawashis ou que je fasse les coutures à la main de mes pièces qui nécessitent des finitions manuelles.

Quel est votre moteur pour vous lever tous les matins ? 

Faire ce que j’aime !

C’est quoi être entrepreneurs pour vous aujourd’hui en France ? 

Etre entrepreneur aujourd’hui en France c’est croire en ses rêves et faire qu’ils deviennent réalité.

Auriez-vous un conseil à donner à quelqu’un qui hésite encore à se lancer dans le grand bain de l’entrepreneuriat ou de la reconversion professionnelle ? 

Croire en ce que l’on est, à ce que l’on a au fond de soi. Se séparer des conventions, s’éloigner des « il faut ». Se dire que si on croit en soi, tout est possible même si tout autour de vous, les gens ont peur et vous disent qu’il y a la crise qui gronde dehors.

Ce qui m’a beaucoup aidée c’est aligner ma vie professionnelle sur mes valeurs : la protection de l’environnement, le respect de la nature et des humains. Aligner son travail et ses rêves. C’est la seule façon de se sentir heureux et de trouver un vrai sens à sa vie, professionnelle et personnelle. Quand tout est aligné, tout est simple, coule de source et le burn-out n’a pas sa place.

Aujourd’hui je me sens à ma vraie place dans l’Univers. Il a fallu que le côtoie la mort pour le découvrir et que j’atteigne 49 ans. Mais ça vaut le coup. La vie a tellement plus de saveur quand on fait ce que l’on aime plutôt que d’aller au boulot à reculons. Les dernières années quand j’allais au journal je me disais: « Allez, encore une journée en prison ». Aujourd’hui, je me suis affranchie des conventions et j’apprécie ma liberté retrouvée.

Le bigorno piquant

Créations écolos et zéro déchet d’objets uniques en tissu.

Fait main, made in Normandy.